En ces temps de quarantaine, nous voulons prendre le temps de nous rappeler des moments spéciaux et de nombreuses figures qui ont façonné notre impressionnante histoire.
Les entraîneurs ont le travail le plus ingrat au RSC Anderlecht. La victoire n'est pas le seul critère : le style doit rayonner de classe et de suprématie. Si la combinaison s’installe et fonctionne, les joueurs attirent toute l'attention. En cas de défaite ou de mauvais football, c’est alors toujours le coach qui devient la cible. Il faut être en acier trempé pour gérer le coaching d’un club comme le Royal Sporting Club Anderlecht. Ils sont vite décriés, nos coaches. Et pourtant, nous leur devons beaucoup.
Le Corse Pierre Sinibaldi a défini l’esprit de notre jeu. Un football technique et fringant. Le terme Football Champagne, inventé par un journaliste du principal hebdomadaire sportif français L’Équipe, remonte d’ailleurs à son époque. Il nous a offert cinq titres consécutifs dans les années 1960.
Tomislav Ivic était du même tonneau. L’infatigable croate a sans cesse innové. Son approche du jeu toucha aux frontières d’une révolution. Il fut l'un des plus grands innovateurs tactiques de l'histoire du football mondial. L'italien Arrigo Sacchi, plus tard entraîneur de l'AC Milan, a fait des Rossoneri l'un des clubs les plus sexy du monde à la fin des années 80, en s’inspirant surtout du système Ivic.
Ivic était un homme têtu. Il faisait répéter, à n’en plus finir, les mêmes schémas et exercices à ses joueurs. Ils en sont devenus fous. Mais son jeu controversé, qui selon certains ne correspondait pas à notre club, s'est avéré très efficace après un certain temps. Attaquer ensemble, défendre ensemble. Du football total. Beaucoup de courses. Un pressing permanent. Aucune innovation ne l’effrayait. Le ballon devait être capturé le plus rapidement possible, déjà dans la moitié de terrain adverse.
Morten Olsen, attiré en tant que médian, fut positionné en libéro et Ludo Coeck a dû s’astreindre à un travail plus défensif en tant que milieu de terrain. Le RSCA a balayé toute opposition lors de la première saison du Croate (1980-81). Il martelait cette étanche collectivité et devenait fou devant la créativité individuelle. Il a, par exemple, réprimandé l'attaquant Kenneth Brylle lors d'un match à Beveren après un but parfait sous un angle assez impossible… alors qu'un coéquipier était libre à ses côtés.
Quelle que soit la réussite qu’il ait connue, une violente controverse a rapidement éclaté au sujet de son système. Le public et une grande partie des médias n'étaient pas encore prêts pour ce type de football. Ivic n'a pas tenu trois saisons. Après un match perdu à Waregem à l'automne 1982, il fut licencié et remplacé par Paul Van Himst. Mais nous devons lui rester reconnaissants. Il a écrit une très belle page de notre histoire. Il a fait briller Lozano, Vercauteren, Olsen, Coeck et bien d'autres.