Certains prétendent qu'il fut le meilleur footballeur de l’histoire en Belgique. Cette déclaration compromettrait les qualités exceptionnelles de Paul Van Himst, Ludo Coeck, Enzo Scifo et autre Robbie Rensenbrink. Juan Lozano était cependant un très grand footballeur. Il s'inscrit dans la lignée des meilleurs joueurs du RSC Anderlecht et donc forcément du royaume.
Juan José Lozano Bohorquez est né le 30 août 1955, à Coria del Rio, en Espagne. À l'âge de sept ans, il émigre avec ses parents en Belgique. Ils s'installèrent dans le quartier du Kiel à Anvers, à l'ombre du stade olympique du Beerschot. C’est là que Juan fit toutes ses classes pour faire ses débuts au sein de l’équipe première en 1974. Il conquit le cœur des fans du Beerschot, souvent très critiques, mais toujours dingues de football. Cinq ans plus tard, il remporta la coupe avec Beerschot.
Juan Lozano partit ensuite jouer au football aux États-Unis, chez les Washington Diplomats et avec le grand Johan Cruijff. Après la faillite de ce club, Michel Verschueren s'en ira le chercher personnellement de l’autre côté de l’océan Atlantique. Le contrat fut signé sur un carton de bière à l'aéroport JFK de New York. Grâce aux toujours très solides capacités de négociateur de Mister Michel, nous ne payerons alors que 12,5 millions de francs belges (312.500 euros) pour ce très grand artiste du ballon rond.
Dès le premier jour, Juan se sentit comme un poisson dans l'eau au Sporting. En tant qu’amateur de football, il rêvait depuis des lustres de jouer pour le compte du RSC Anderlecht. Il voulait briller aux côtés des meilleurs footballeurs. Et ils évoluaient au Parc Astrid. Arie Haan parti au Standard, Juan devint vite la figure de proue du milieu de terrain avec Franky Vercauteren. Au RSCA, il eut la liberté de se montrer créatif. Il détestait les contraintes tactiques et les longs joggings en forêt.
Il fut également l’homme des grands matches. Juan Lozano jouait pour le plaisir. Il ne se souciait vraiment pas des petits clans formés par les Hollandais, des histoires d'argent et de tous les autres problèmes. Il signa l'une de ses meilleures performances contre la Juventus lors de la Coupe d'Europe des clubs champions de 1981. Deux ans plus tard, il nous mena à la victoire en Coupe de l’UEFA en signant le but décisif dans le match retour de la finale, à Lisbonne, contre le Benfica.
Ce fut pourtant sa prestation en quarts de finale de la même campagne qui détermina son avenir. Dans le match disputé à et contre Valence, que nous avions gagné 1-2, Lozano fut si impressionnant qu'il suscita l'intérêt du Real Madrid. La saison suivante, il partit donc pour Madrid, qui paya 75 millions de francs belges (1.875.000 d'euros) pour l’élégant milieu de terrain. Un montant record à l'époque, même pour le Real Madrid. Michel Verschueren put se montrer fier de cette plus-value.
Le 12 décembre 1984, Juan Lozano figurait dans l'équipe madrilène qui nous infligea un 6-1. Son séjour à Madrid ne fut toutefois pas un succès inoubliable. Il y fut la victime de deux fractures du péroné et il fut freiné par des problèmes de condition. Finalement, il tomba en disgrâce auprès de l'entraîneur Amancio. Nous lui avons à nouveau ouvert grand les bras en 1985. Il vint rivaliser avec Enzo Scifo et René Vandereycken. Et, en un rien de temps, Juan Lozano récupéra naturellement sa place de titulaire.
Comme par le passé, Juan se montra décisif à de nombreuses reprises. Jusqu'à ce jour noir du 11 avril 1987 au stade Arc-en-Ciel. Et un tacle totalement irréfléchi d’Yvan Desloover, le joueur de Waregem. Il ne se remettra jamais de cette double fracture de la jambe. Il ne jouera plus jamais non plus au Sporting. Juan Lozano poursuivit sa rééducation au RSCA durant deux années supplémentaires et partit ensuite à l’Eendracht Aalst où il joua dix-huit matches de plus en deuxième division.
Juan Lozano est l'un des meilleurs footballeurs que ce pays ait connus et, pourtant, il n'a jamais remporté de Soulier d’Or, ni joué pour une équipe nationale. En Espagne, il est resté trop longtemps inconnu et il n'a jamais pu jouer chez les Diables Rouges, car la commission sénatoriale belge a refusé sa naturalisation avant la Coupe du Monde 1982 en Espagne. Juan nous a aidés à remporter deux titres, deux coupes nationales et une coupe de l’UEFA. Il sera à jamais l'un des nôtres !